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De Huaraz à Ayacucho

récit de voyage no 6

Nous ne quittons pas Huaraz sans effectuer le fameux Trek de Santa Cruz (4 jours), celui qui monte dans la spectaculaire Quebrada Santa Cruz et traverse le col de Punta Union (4760m) pour déboucher, de l'autre côté, dans la Quebrada Huaripampa.

Afin d'être plus économique, nous organisons notre trek tout seul. Nous louons le service d'un muletier et de ses deux ânes ainsi que le matériel de camping (une petite tente de bivouac pour deux,  une grande tente de cuisine dans laquelle peut également dormir le muletier, l'équipement de cuisine et bien sur la nourriture). Pour le choix de celle-ci, nous nous faisons aider par Mila, charmante péruvienne travaillant dans une agence de trekking. Elle nous donne une liste des aliments à acheter et c'est ainsi que nous partons au marché central où nous achetons les produits de bases, légumes, fruits, poulets, viande, yaourth, pain, entre autres.

Le lendemain, c'est tout une expédition, chargé de nos quatre gros sacs, d'une lourde caisse et d'une grosse bonbonne de gaz, nous prenons tout d'abord un taxi qui nous mène au terminal de bus de Huaraz d'où nous prenons un mini bus qui en deux heures nous amène à Caraz. De là nous prenons un moto taxi pour un autre terminal plus haut dans la ville et prenons enfin un mini bus pour Cashapampa (2900m), petit village où nous attend Amador notre charmant muletier ainsi que Morena et Justin ses deux ânes. Il est 12h et très rapidement, après arrimage de nos charges sur le dos de nos bourricots, nous commençons notre ascension vers notre premier campement à 3700 m. Après quatre heures de marche dans une vallée creusée où l'on passe devant des myriades de petites cascades, nous arrivons sur une petite plaine où Amador a déjà installé les tentes et préparé un thé, bien apprécié.

Après un bon repas, nous nous retirons dans notre tente qui est minuscule, nous avons à peine la place pour nous tourner.  Cette nuit, il pleut passablement, nous rêvons tous les deux de bateau ! Pas étonnant, après quelques heures de pluie notre tente, pas étanche, se transforme en piscine, nos deux minuscules matelas flottent sur de grosses flaques d'eau qui grossissent durant la nuit. TOUT est trempé et que nous sommes congelés. Nous ne savons plus où nous tenir dans notre mouchoir de poche de tente. Telle une île au milieu de l'Océan, nous passons tant bien que mal la nuit. Le lendemain après avoir tout sorti de la tente, nous hésitons à rebrousser chemin et retourner à Huaraz où un hôtel confortable nous attend.

Après mûre réflexion et suivant les conseils d'Amador, qui est sur de trouver plus loin du soleil pour sécher nos sacs de couchage, nous décidons de continuer. Après quatre heures de marche le long de lacs émeraudes, de paysages superbes, nous arrivons trempé par la pluie au campement de Taullipampa (4250 m) qui se trouve sur une superbe prairie au pied du majestueux Nevado Taulliraju (5830m). Au sud se détachent à l'horizon le Nevado Artesonraju (6025m) et le Nevado Parón ((5600m), malheureusement ces splendides sommets jouent à cache cache avec les nuages.

Quand à l'Alpamayo, que d'aucuns considêrent comme la "Plus Belle Montagne du Monde", pas de chance, elle ne daignera pas se montrer ! Quand au soleil, il n'est pas au rendez vous pour sécher nos affaires trempées durant la nuit. 

La tente de cuisine se transforme en séchoir, au dessus des casseroles sont suspendus, d'une manière bancale, nos sacs de couchage et sacs à viande dans l'espoir qu'ils sèchent avant la nuit. Ce soir nous dormons avec Amador dans la tente de cuisine, notre literie est malheureusement encore un peu humide. Il fait froid, le vent souffle, il pleut et juste au dessus de nous, il neige. Nous dormons tout habillés avec bonnet, écharpe, gants et pour garder chaud nous nous couvrons de notre couverture de survie en aluminium. Il va sans dire que chaque mouvement ne passe pas inaperçu...

Très tôt le matin nous levons le camp, une longue journée nous attend. Après deux heures de montée dans un sentier en partie  enneigé sur le haut, nous traversons le col de Punta Union (4760m), sorte de brèche angulaire dans la paroi rocheuse. Des deux côtés, le regard embrasse un paysage fascinant, dommage que les nuages cachent les cimes enneigées. Après le col, on amorce pendant quelques heures  une descente tortueuse le long d'une saillie rocheuse jusqu'à la Laguna Morococha, puis passons le camp de base de Paris (3850m) pour enfin arriver à un refuge construit par un curé italien. Nous avons de la chance car c'est le seul refuge dans la région et après nos deux nuits froides et humides, nous aspirons à un peu de confort. 

 

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à en avoir  besoin, un sympathique couple d'anglais  rencontré lors des différents campements opte pour la même solution. Il a bien du mérite Richard (55 ans) qui depuis six ans souffre  de la maladie de Parkinson. Avant que sa maladie ne dégénère complètement, il profite, en compagnie de sa femme Phill, de faire un maximum de trekking. Quel courage et quel lucidité ! Nous passons une sympathique soirée avec nos nouveaux amis Richard, Phill, Amador et Pedro le muletiers des anglais. 

 

Pour le dernier jour, une courte descente nous  conduit au hameau de Huaripampa et à ses maisons quechua traditionnelles au toit de chaume. En chemin nous rencontrons plusieurs mamitas, campesinos et enfants qui nous saluent chaleureusement. Le trek se termine après une courte remontée à Vaqueria (3700m) où nous montons sur un camion de passage. Et durant trois heures Pascal juché sur le toit et moi avec les anglais dans la cabine du chauffeur où déjà cinq autres passagers y sont  coincées. La descente jusqu'à Yungay est une fois de plus vertigineuse. A chaque tournant, lorsque les roues du camion sont face à la descente, je ferme les yeux et retiens mon souffle, bien que  cela ne sert pas à grand chose ! ce qui fait rire les autres passagers sauf moi!  Heureusement le chauffeur, Alex, roule prudemment. Tout en roulant il me donne des cours de quechuan. Euh j'ai déjà tout oublié !

Bien que Huaraz nous ait beaucoup plu et qu'il y ait encore beaucoup de treks à faire, il est temps de poursuivre notre chemin. Pour rejoindre Ayacucho, nous décidons de ne pas prendre la route la plus rapide, ni la plus facile, celle qui passe par  Lima. Mais plutôt celle qui reste sur les hauteurs hors du "chemin des gringos". Découvrir un pays c'est aussi le découvrir de l'intérieur, pas uniquement que les beaux sites touristiques. Pour cela nous devons prendre beaucoup de différents bus, taxis, colectivos.

De Huaraz nous traversons la splendide vallée de Conchucos tout en admirant les sommets enneigés de la Cordillère Blanche qui l'entourent. Après trois heures de route nous arrivons à CHAVIN, petite localité très tranquille aux maisons joliment peintes de toutes les couleurs. D'habitude les visiteurs ne font que la traverser dans le cadre d'excursion d'une journée depuis Huaraz. On peut visiter les ruines de Chavin de Huantar, inscrites au patrimoine mondial de l'Unesco. Ses ruines pré-incas comptent parmi les plus importantes et les plus mystérieuses du continent. Alors que les touristes retournent sur Huaraz nous visitons sans être dérangés par la foule son intéressant musée ainsi que son site archéologique. 

Nous restons une nuit et très tôt le matin nous prenons un bus qui nous dépose en trois heures au croisement de Conococha, de là nous prenons un taxi pendant trois heures jusqu'à La Union et pas le temps de descendre du taxi que nous sautons déjà dans un colectivo qui nous amène après quatre heures de route à travers des paysages splendides à HUANUCO (1894m). Ses habitants affirment que, grâce à une altitude idéale, cette ville bénéficie du meilleur climat au monde. Par contre en ce qui concerne la tranquillité ce n'est pas le pied. Les motocaros grouillent de partout, klaxonnent, que de bruit ! A peine supportable après la paix des montagnes, un jour nous suffit. Au Pérou, les chauffeurs sont les Rois du klaxon et les corps de sécurité les Rois du sifflet, ces deux instruments sont utilisés la plupart du temps à tort et à travers ! 

 

Pour rejoindre Ayacucho, il faut faire des tours et des détours. Nous n'avons pas envie de voyager de nuit car si nous voyageons de la sorte c'est aussi pour découvrir, admirer des nouveaux paysages. Parfois, il faut penser rusé pour être capable de voyager de jour et en même temps trouver des connexions qui nous amène finalement à notre destination. Voilà la raison pour laquelle nous choisissons de passer par CERRO DE PASCO, qui est un carrefour routier de la région. Si ici, il n'y a pas de touristes ce n'est pas étonnant. Entre le "soroche" (mal de montagne) et le climat glacial, cette ville minière située à une altitude vertigineuse de 4333 m. dans l'altiplano est loin d'être accueillante. Plus haute localité de cette taille (45'000 hab.) du monde, Cerro de Pasco offre un spectacle saisissant. Au premier regard les maisons de couleurs terre et les rues s'étendent au hasard autour d'un gouffre artificiel large de plusieurs kilomètres dans les collines dénudées. Des gisements d'argent et d'autres minerais font de cette ville une ressource lucrative. Ici, les nuits sont glaciales, dans les rues très peu éclairées tout le monde est habillé d'écharpe, bonnet, gants. On se croirait en Sibérie brbrbr ! L'hôtel n'est évidemment pas chauffé, par contre on a droit à une bouillotte avant d'aller au lit, celle-ci est la bienvenue tant on se les gèle, et en plus, la raréfaction de l'oxygène nous donne de la peine à respirer, ce n'est pas ici que l'on va  courir un 100 mètre pour se réchauffer ! Voici un endroit intéressant où l'existence est bien rude et où il ne fait pas bon vivre.

 

Le lendemain, nous partons sur Huancayo et traversons des paysages austères, des villages tristes dont celui de La Oroya, morne et froid, cette ville, se proclame "capitale métallurgique du Pérou et d'Amérique du Sud". Récemment inscrite par le Blacksmith Institut sur la liste des dix endroits les plus pollués de notre planète, cela donne froid dans le dos. Soudain dans le bus une jeune femme pleine de courage se lève et commence à chanter des chants tristes puis vend des biscuits tout en tenant un long discours expliquant combien la vie est dure et que si elle fait cela c'est pour échapper à la prostitution. Ces mots ne nous laisse pas indifférents.  Heureusement pour égayer le coeur en chemin, nous rencontrons des troupeaux de lamas et d'alpagas.         

 

Puis nous arrivons à HUANCAYO (3244m) qui est une grande ville sympathique de l'altiplano central où se mêlent apparence moderne et attachement farouche aux traditions. Il fait bon flâner dans les rues peuplées de jeunes et dans le marché haut en couleur. En plus il y a des bons restaurants. 

Nous faisons un crochet par HUANCAVELICA (3690m). Curieusement, peu de touristes visitent cette jolie ville coloniale.  Ses habitants, pour la plupart des "campesinos", sont adorables. Quelle aubaine, moi qui suis à l'affut des mamitas, il y en a partout !

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