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De Huancavelica à Andahuaylas

récit de voyage no 7

Il est 4 heures du matin à Huancavelica, il fait froid, dans la rue on croise quelques "bourachos",  des chiens errants et quelques péruviens, qui tout comme nous, prennent un bus matinal. Notre bus pour Lircay tarde à venir et arrive avec 1 h. 30 de retard, ce qui nous donne le temps d'être congelés. Après quatre heures de route, de laquelle on aperçoit parfois une mine, nous arrivons dans la bourgade de Lircay.

 

De là, il nous reste encore six heures pour arriver à Ayacucho. Pour Pascal la journée est très longue. Ayant mal digéré le repas de la veille, il a des problèmes d'estomac, heureusement qu'il est le seul. Pendant que Pascal, en attendant le départ de notre combis, dort à l'intérieur, moi telle une extra terrestre, je fais l'animation du bourg. Les enfants, mamitas, papitos curieux viennent me demander d'où je viens. Apparemment ils ne voient pas beaucoup de touristes par ici. Pour certains tous les étrangers sont américains, et ceux n'ayant pas d'éducation n'ont jamais entendu parler de l'Europe. Beaucoup ne sont jamais sortis de leur village et en plus lorsqu'ils apprennent que nous sommes venus d'Europe en avion, ils nous considèrent comme des gens très très  très riches pour pouvoir faire un tel voyage. 

 

Lorsque nous poursuivons notre route avec le combi pour Ayacucho, nous déposons quelques passagers dans différents hameaux dans la montagne, l'un des plus haut situé à env. 4500 m. Dieu ce qu'il fait froid ici ! Les maisons sont construites de manière très rustique en pierres grossièrement taillées couvertes d'un toit de chaume et bien sûr sans cheminée. Et nous comprenons combien nous sommes très très très riche en comparaison à leur misérable vie. Il semblerait que Huancavelica soit une des provinces les plus pauvres du Pérou. En chemin nous croisons à nouveau des grands troupeaux de lamas et d'alpagas. Pour ne pas les confondre chaque berger attache autour des oreilles de ses animaux, tel des boucles d'oreille, des rubans de laine de couleurs différentes. Ce qui leur donne un air coquin. Tels de jeunes donzelles, ils broutent dans les pâturages alpins. Ils ne semblent pas être perturbés par la grêle qui nous surprend en route et qui blanchit rapidement les champs. Parfois on a  l'impression que la route ne s'arrêtera jamais de monter tant les montagnes péruviennes sont hautes.

A 19 h. nous arrivons enfin à AYACUCHO 2750m. 

Ici, nous pouvons  à nouveau nous balader en T-Shirt. Le nom de cette fascinante ville coloniale, dérivé des mots quechua "aya" (mort ou âme) et "cuchu" (arrière-pays), offre un aperçu révélateur sur son passé. Berceau du sentier lumineux qui a, dans les années 1980 à 1990, provoqué des milliers de morts, Ayacucho resta pratiquement inaccessible aux voyageurs pendant cette période. La situation change en 1992 lorsque Abimael Guzman, le fondateur du Sentier lumineux, est arrêté et condamné, mettant fin à douze ans d'une guérilla sanglante.

Nous sommes tout de suite conquis par le charme de cette ville avec ses églises richement décorées, ses bâtiments coloniaux aux couleurs pastels, ourlés de balcons en bois, ses cours intérieures, son artisanat aux couleurs flamboyantes.

A peine arrivés que nous faisons la connaissance d'Alejandro Gallardo Liacctahuaman un sympathique artiste qui a hérité de sa famille  le savoir faire de la fabrication de tapisseries pré-hispaniques. Dans son atelier nous pouvons admirer  des tissages splendides. Nous avons aussi l'occasion de parler du passé, de l'horrible époque du Sentier Lumineux. Père de quatre enfants, durant ces nombreuses années de terreur lui et sa famille ont dû rester cloitrés dans leur maison. Ils vivaient dans la misère étant donné qu'il était incapable de sortir de la maison pour vendre ses tapisseries, parfois ils n'avaient rien à manger. Aujourd'hui pour sa famille, heureusement, la chance a tourné, les quatre fils sont à l'université, et Alejandro voyage dans le monde entier pour faire des expositions. Il est d'ailleurs amoureux de la Suisse où il a dernièrement exposé.

Aujourd'hui, nous passons la journée à Quinua à env. 30min de bus d'Ayacucho. Ce joli petit village typique est fameux pour ses céramiques d'un genre tout particulier. Tel des maestros, les artistes modèlent l'argile avec grande dextérité en créant des oeuvres d'arts, représentant  leur vision cosmique, leur identité. Beaucoup des objets représentent des églises tarabiscotées avec leurs fidèles, des maisons, des personnages populaires. Sur les toits de chaque maison à Quinua, il y a une céramique, tantôt c'est une église, une maison, un animal... Celle-ci a pour fonction de protéger et de chasser les mauvais esprits. Cela donne un charme de plus à ces maisons typiques. Nous avons de la chance car à peine arrivés que nous assistons à deux mariages quechuans. Nous pouvons admirer les mariés et profiter des différents petits orchestres locaux qui les accueillent à leur sortie de l'église.

Ce matin nous nous levons à 6 heures, cette fois-ci non pas pour prendre un bus mais pour faire la tournée des églises. Elles sont malheureusement ouvertes uniquement lorsqu'il y a une messe et comme c'est dimanche,  nous profitons de les visiter à tour de rôle (euh non! nous n'assistons pas à chaque messe).  Ayacucho possède plus de 33 églises et temples (autant que d'années de la vie du Christ) dont la plus ancienne date de 1540, il y a de quoi visiter.

Puis vient 11 h., alors que nous nous reposons assis sur un banc de la Plaza de Armas, nous avons droit au défilé hebdomadaire et discipliné des jeunes. Des dizaines d' étudiants de tout âge en uniforme venant d'écoles différentes marchent tels des robots d'un pas martial. Sur une petite estrade un homme pas très grand, macho et fachiste entame d'une voix puissante et autoritaire un discours nationaliste et ordonne  à chacun de se lever et d'enlever son chapeau durant l'hymne national. Suivra un défilé de l'évêque et de ses ouailles habillées de noir tels des croques-mort sur le rythme de la fanfare  militaire. De quoi nous donner froid dans le dos. La place qui d'habitude est conviviale se transforme en un lieu d'oppression. Il semblerait que ce grotesque spectacle se produise tous les dimanches et ceci depuis de nombreuses années avec toujours le même discours.  Chaque dimanche trois écoles sont sélectionnées et les jeunes sont transformés en pantins, tels des soldats de plomb, quelle barbarie! 

Quel contraste entre l'amour, la tolérance, le respect, l'égalité que l'on prêche dans les églises et le despotisme que l'on pratique hors de celles-ci sous les yeux même des membres du clergé. Quelle hypocrisie ! Puis plus tard dans l'après-midi nous avons droit dans un autre quartier à une procession d'un saint quelconque .

N'est ce pas tout du pareil au même ? Une manière comme une autre de manipuler la masse. D'un côté on brandit la carotte et de l'autre le bâton ! Plus tard, un français vivant depuis huit ans au Pérou nous explique que ce manège se fait dans plusieurs régions du Pérou et pas uniquement à Ayacucho. Apparemment c'est le seul moyen que les dirigeants aient trouvé pour éduquer la population. Il semblerait que le gouvernent  n'aille pas beaucoup d'imagination pour croire que son peuple ne peut être éduquer uniquement par la peur et le pouvoir. Il a bien peu d'estime pour ses citoyens pour imposer cette dictature chaque dimanche.

Si vous n'avez pas de balance chez vous pas de problème, dans la rue vous trouverez sans autre un enfant ou une mamita qui vous louera la sienne !

 

Acayacucho est une ville estudiantine  très dynamique culturellement. Chaque jour, il y a des animations, des conférences, des concerts. La température est idéale. Dommage que nous devions continuer notre chemin et retrouver le froid.

Pour couper la route nous menant à Cuzco, après huit heures de bus, nous nous arrêtons à ANDAHUAYLAS  petite ville située à  2980 m. Cet arrêt nous permet d'aller visiter l'imposant site de Sondor, construit par les Chanka, qui s'élève à flanc de colline. Les Chancas étaient traditionnellement les ennemis des Incas, mais partageaient leur souci d'un emplacement stratégique. Ici, nous sommes loin de la horde de touristes de Cuzco, nous profitons une fois de plus de visiter un beau site tout seuls.

Après avoir été : tunisien, grec, turc, italien, espagnol, cubain, guatemateque, vénézuélien, brézilien, maintenant Pascal passe pour un péruvien ! Et moi, pour pas changer, pour une gringa ! Décidément  J'ai épousé un homme multi-national !

Ras le Bol du poulet, frites, je rêve d'un bon plateau de fromages accompagné d'une bonne bouteille de vin. Demain départ pour Cuzco.

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